
Habib Koité à Abidjan | Un concert marqué de reconnaissance et de gratitude
Gratitude et reconnaissance. C’est ainsi que l’on pourrait qualifier le concert du 6 octobre 2023 donné par Habib Koité à l’Institut Français d’Abidjan, en Côte d’Ivoire. Une salle qu’il retrouve après 1994, date de son premier concert sur les bords de la lagune Ebrié avec les Go du Koteba. En 1995, Habib reviendra à Abidjan, en provenance de Bruxelles, pour prendre part – pour sa première fois – au Marché des Arts du Spectacle Africain (aujourd’hui Marché des Arts du Spectacle d’Abidjan) – MASA. D’Abidjan, destination d’après : Londres, en Angleterre… L’année d’après, l’artiste est sacré lauréat du Prix découverte RFI (96). Habib Koité, c’est une vie scénique marquée par les tournées à travers le monde.
Le samedi 6 octobre, c’est la structure événementielle Wendy & CO en collaboration avec l’Institut Français d’Abidjan (IFA), qui lui permet une escale musicale sur les bords de la lagune Ebrié. Un concert qui a marqué le 2223è d’une carrière de plus de trente ans. Chaleureuse retrouvaille avec le public abidjanais qui n’a pas trainé les pas pour le voir sur la scène de l’Institut Français d’Abidjan. De cet amour qui lie les peuples et les personnes, pris d’une passion commune – la musique, Habib, accompagné de Bamada, son band, en est mélodiquement reconnaissant.
« Merci. Nous sommes chanceux d’être là ce soir. C’est un bonheur pour nous d’être là, de jouer pour vous. Nous sommes heureux de voir à nouveau chacun de vous. Depuis ces longues années, je remercie Dieu, pour toujours ». S’il adresse ce message de reconnaissance au public abidjanais, « Forever » qui en est le titre, est extrait de KARIFA [Ce que l’on te confie, en malinké], son récent album de 12 titres. Le 6è album studio. De « Forever », version studio, l’artiste-chanteur Habib Koité, qui est d’ailleurs un excellent guitariste, témoigne de cette gratitude qu’il n’a pu partager et transmettre seul, par la remarquable collaboration de son compatriote Toumani Diabaté (Kora) et du virtuose Sekou Bembeya Diabaté / Diamond Fingers (de la Guinée).
Francophone, sinon bamanan aux origines, Habib chante [Forever] en anglais. Pour les oreilles exigeantes, l’artiste tourne même en dérision son accent. Au fond, ce qui touche le plus – et Habib le sait, c’est la beauté du message ajouté la conversation mélodique qui habille le chant. De l’humour, Habib Koité en a à partager et il ne manque pas d’occasions pour titiller ses parents à plaisanterie. C’est peu de le dire, la musique de Habib Koité (au son de Dozo n’goni transposé sur guitare) est unificatrice. Aussi, même s’il n’en sert pas un menu de critiques, la boutade suffit pour dénoncer l’impossibilité pour le Malien, de circuler librement vers et dans le nord du Mali. Du fait de la menace djihadiste. Ce qui explique, selon le musicien, pourquoi en réalité les images pour la cover de KARIFA ont été prises dans le désert marocain et non au Mali.
Ouvert sur le monde aux rythmes des voyages, Habib veut davantage aller à la découverte du monde, voir ce qu’il s’y passe et transmettre une meilleure compréhension des choses. En cela, le chanteur est sensible au réchauffement climatique, parle de nouvelles technologies, invite à la tolérance et chante sur un fond reggae, YAFFA [extrait de KARIFA].
Avant de se présenter au public avec le Bamada (batterie, basse, guitare, piano, talking drum), Habib Koité, chant et guitare lead, avait pour guest (invitée) la chantre musulmane Aïcha Traoré dont le répertoire est ouvert à la variété. Accompagnée de ses cinq musiciens (batterie, basse, guitare, piano et talking drum), Aïcha Traoré qui est face à un public qui n’est pas sa fan base, ne tarde pas à le séduire. Quand elle met fin à sa prestation, les ovations nourries de près d’une minute sont la preuve qu’elle a relevé cet autre défi. « I tchèssiri », prête à tous les combats, son chant d’au revoir, témoigne de cette volonté pour elle d’aller le plus loin possible dans sa carrière musicale.
Témoignage fait de son talent, Habib Koité rappellera « la grande dame » qu’elle est pour un duo qui ouvrira sa tracklist [Habib] du soir. Au son de « I Mada », extrait de l’album Ma Ya, chant d’amour, conversation idyllique, Habib et Aïcha bercent de leurs voix le public, enchanté et conquis.
Même s’il n’est plus aujourd’hui le jeune homme des années 90, Habib, aidé du son d’ambiance que procure le talking drum et de la belle orchestration, reste un showmaker [en témoigne Muso Ko (affaire de femme) tiré de l’album du même titre], car le temps ne compte pas pour lui sur scène. Mais, de son temps de scène, l’Institut Français lui en accordera 1 heure 30. De Muso Ko, Habib voue presqu’un culte à la femme car, chante-t-il, s’il « le pouvait, la femme ne mourrait pas ».
A la fin du concert marqué de reconnaissance et de gratitude, Habib Koité a sacrifié son temps à la dédicace de KARIFA, dans le Hall de l’Institut.
© Koné Seydou